Sans contraintes, pas d’innovation. Cette phrase est devenue une évidence à force d’être répétée. Il est connu que c’est plus facile de se réinventer quand son marché se réduit de 10% par an que lorsqu’il se développe du même pourcentage. Les plus beaux exemples d’entreprises ayant du succès dans la durée sont d’ailleurs très souvent celles qui savent continuer à proposer de nouveaux produits/services tout en restant en progression. La condition étant qu’il n’advienne pas de disruption apportée par l’extérieur (Apple et son iphone pour Nokia par exemple).
La contrainte dans la recherche d’idées
S’il y a plusieurs phases dans la recherche d’idées, il arrive un moment où, le process de réflexion se concentre sur une identification précise des contraintes qu’il faudra contourner.
Celles-ci peuvent par exemple être :
○ Economique : Pour Renault et la Logan, la contrainte était d’obtenir un prix de revient plus faible que celui fourni par les processus traditionnels de fabrication. Ce qui mena l’entreprise à affiner ses modèles d’analyse fonctionnelle et à revoir de bout en bout le processus de production.
○ Ecologique : Pour Toyota, les contraintes les plus importantes à contourner étaient l’augmentation du prix du pétrole et la conscience écologique. Ce qui a permis la commercialisation du moteur hybride.
○ Légale. Nous pourrions citer les tabatiers qui doivent commercialiser leurs produits sans en faire la publicité. Nous pouvons aussi citer checkmymetro qui ne pouvait pas utiliser le plan de métro de Paris et dû lancer un concours pour créer une carte alternative jusqu’à ce que la RATP change d’avis.
Ces contraintes peuvent être appelées « contraintes amonts » et c’est un jeu intellectuel passionnant que de chercher l’idée qui les contournera.
Il ne faut pas oublier les « contraintes avals » qui concernent les idées qui auront été trouvées et qui seront la base de l’innovation (si vous tenez vraiment à ce mot).
La contrainte dans la mise en place des idées
Il faut aussi pouvoir classer les idées innovantes, leur importance, pour en prioriser leur mise en place dans l’organisation actuelle.
Ce qui, nous place devant d’autres contraintes :
○ La faisabilité : Qu’est ce qui est fonctionnellement possible ? Sous combien de temps et avec quelles ressources ? Avons-nous la technologie ? Nos clients sont-ils assez matures ?
○ La viabilité : Est-ce que l’idée peut intégrer notre business modèle actuel ? Est-elle complémentaire d’un service existant ? Répond t’elle à un besoin durable ?
○ La désidérabilité : Est-ce que cette idée a du sens ? Peut-elle être facilement vendue en interne ? Sera t’elle adoptée facilement par les clients ? Touche t’elle à l’image de l’entreprise ? Au prestige de nos clients ?
Ces contraintes ne sont pas égales et seront traitées différemment d’une entreprise à l’autre en fonction de sa culture.
S’il s’agit d’une culture favorisant la rapidité, il y a de fortes chances que seules les idées au potentiel économique rapide soient implémentées. Il faudra donc s’attendre à ce que les nouvelles idées soient incrémentales, prévisibles et très facilement copiables par les concurrents.
S’il s’agit d’une culture plus « ingénieur », il y a des chances que l’entreprise mise sur une rupture technologique. Dans la plupart des cas pour ces entreprises, le process d’innovation est pris à l’envers. Il est demandé à des équipes de chercheurs de faire une découverte que l’on cherchera ensuite à intégrer dans les produits/services déjà commercialisés. Peter Drucker écrivait dans “Innovation et Entrepreneurship” que cette approche était très risquée. Très peu de découvertes techniques apportent un ROI rapide qui justifie les coûts de développement.
C’est aussi sous-estimer les freins internes quand la découverte semble mettre en péril le Business Model actuel (les premiers capteurs numériques ont été développés par Polaroid et Kodak) ou sont tellement en avance, que les commerciaux ne savent qu’en faire (la souris et l’affichage graphique développés au Xerox PARC).
En résumé,
1 – Il faut des contraintes clairement identifiées pour inventer de nouvelles solutions
2 – Les idées innovantes doivent pouvoir équilibrer faisabilité, viabilité et désidérabilité
3 – L’équilibre doit aussi être trouvé entre court-terme et long-terme
4 – La culture de l’entreprise est un élément très important de sa capacité d’innover